Aujourd'hui trentenaire, je me renseigne depuis plus d'une dizaine d'années sur les problèmes et pronostiques climatiques. L'avalanche d'informations catastrophiques a en partie contribué à fortement accentuer chez moi une anxiété déjà présente, et à aggraver un état dépressif. Je suis passé par des phases d'intense colère, de peur, de mélancolie, j'ai connu pendant plusieurs années ce que l'on nomme "l'éco-anxiété". J'ai tenté d'intégrer une association militante de lutte pour le climat, mais à l'époque cela me demandait trop d'investissement psychique. Maintenant, je me sens assez dégagé de l'urgence climatique, je suis très résigné. Je pense d'un côté que l'espoir vient de l'action et que l'humanité pourrait se rassembler dans une lutte commune pour construire un monde plus (sur)vivable, au-delà de quelques actions isolées sur certains territoires, mais je constate d'un autre côté qu'il y a bien trop de freins idéologiques pour que cela se fasse : trop de gouvernements autoritaristes préfèrent conserver un pouvoir illusoire en contrôlant leurs populations, en faisant la guerre, en torturant les êtres vivants (dont les êtres humains), même si cela doit passer par l'exterminateur du vivant pour s'accaparer quelques ressources supplémentaires ; les pseudo-démocraties sont de leur côté figées dans une idéologie néolibérale qui bloque considérablement les avancées écologiques ; les citoyens les plus "libres" souffrent en conséquence souvent de dissonance cognitive par rapport aux enjeux gigantesques et à leur mode de vie, sans compter ceux qui ne souhaitent d'aucune façon changer celui-ci, quitte à détruire l'environnement. Je pense que l'humanité possède une sorte de "gène" d'auto-destruction qui la pousse à toujours vouloir se battre contre quelqu'un ou quelque chose plutôt que de vivre en paix et simplement. Or, elle a aujourd'hui tous les moyens en sa possession pour se détruire définitivement. Ainsi, je me suis fait à l'idée que nous verrons de plus en plus d'horreurs, des réfugiés climatiques mourant par milliers, des sociétés se recroquevillant sur elles-mêmes, des conflits éco-systématiques qui s'enliseront, des catastrophes naturelles en augmentation. Aucun pays ne sera épargné par les problèmes climatiques. Je me suis résigné à l'idée de souffrir, que peut-être mes descendants mourront de manière prématurée dans un monde sale. L'humanité réagira sans doute trop tard, lorsqu'elle sera acculée. Ce n'est pas pour autant que l'être humain disparaîtra, mais je ne sais pas dans quelle mesure il est souhaitable de survivre dans un monde invivable. Ainsi, je profite des moments passés avec mes proches, j'essaie de me rendre utile de temps en temps, je fais quelques activités pour me changer les idées, j'essaie de prendre soin de ma santé (surtout mentale), je ne cherche pas à changer le monde même si je reste à l'écoute d'initiatives constructives pour le futur. J'ai perdu l'espoir mais pas l'envie de continuer à vivre ce qui vaut le coup d'être vécu, et je souhaite courage à l'humanité qui souffre et va continuer à souffrir et faire souffrir énormément les autres formes de vie.
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